Quoi de plus absurde que de répondre à l’injonction de la nouveauté quand elle se formule au travers d’une langue morte ? C’est peut être pour conjurer la fin du langage philosophique que je tente de manifester sa pertinence au travers de thèmes et d’objets issus du quotidien.

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Les Lois de l'Attraction



Il serait aisé de se perdre dès lors que l’on essaie d’analyser l’œuvre cinématographique Les lois de l’attraction de Roger Avary. Je laisse aux historiens du cinéma le soin et la patience de décoder toutes les références au cinéma traditionnel aussi bien que populaire. Il n’est pas de mon ressort de psychanalyser les personnages du film qui, tous autant qu’ils sont, en auraient sans doute bien besoin.

J’aimerais plutôt analyser ce qui fait que l’on parler des Lois de l’attraction comme d’une tragédie moderne en étudiant les caractéristiques formelles empruntées à la tragédie et les spécificités modernes du traitement des rapports humains en espérant éclairer les multiples références culturelles qui font de ce film une œuvre œcuménique en contraignant les différents modèles philosophiques à se rencontrer et à s’affronter dans un monde, qui précisément, ne semble pas, se prêter à la pensée. 


Je ne me permets qu’un avant-propos indispensable à la compréhension à ma lecture du film. Pour comprendre véritablement le film, il est indispensable de distinguer plusieurs niveaux de lectures. Cependant, et je crois qu’il est essentiel d’insister là-dessus, les niveaux de lectures de n’invalident pas les uns les autres mais se nuancent les uns les autres. Le film n’est pas dogmatique, son propos n’est pas de défendre une thèse, mais de montrer par l’artifice cinématographiques les hommes et leurs mœurs. Il faut, pour saisir le film dans sa complexité et dans sa richesse être capable de lire plusieurs niveaux de lecture en même temps pour saisir la situation, le vécu subjectif du personnage concernant la situation qu’il vit et l’ironie du réalisateur vis-à-vis des personnages auxquels il donne vie.

L’organisation de l’œuvre en actes :


Premier acte :


L’œuvre est organisé selon le découpage traditionnel théâtral à ceci près que l’on commence par la fin. La fin n’est pas à comprendre comme la conclusion tragique mais comme la perspective existentielle des personnages, ce que nous pourrions appeler leur devenir. Le film a donc, la charge narrative de justifier cette fin par les circonstances passées qui la déterminent. Il ne faut pas s’y tromper, il s’agit bien d’une présentation des personnages en bonne et due forme comme l’indiquent les noms indiqués en violet en surincrustation sur l’image.

Deuxième acte :


Retour par « rembobinage cinématographique » au début de l’intrigue où l’on découvre les trois protagonistes dans des situations de calme et d’apaisement. La bande originale de Donovoan à The Cure en passant par … soulignent bien cette sérénité ambiante qui règne dans cet univers pacifié qu’est l’université. Les personnages sont ainsi présentés dans leur simplicité et leur naïveté adolescente. Progressivement, celles-ci sont abusées et souillées progressivement, principalement par l’action d’ailleurs de Sean Bateman, le frère de Patrick Bateman, le serial killer imaginaire d’American Psycho[1]. A leur manière, ces deux frères corrompent donc leur univers en extériorisant leur mal être. 

Troisième acte :

Le troisième acte est une rupture paradigmatique en ce qu’il montre la facticité de ce qui est annoncé comme la fin dès le début. Sean ne va pas finalement, avec la jeune femme qu’il semblait avoir séduit au tout début du film et puisque l’on voit sortir Paul et Lauren fumer une cigarette, on peut également penser que ce qui était annoncé n’est finalement pas arrivé.

Le début de la fin

On a l’habitude de caractériser l’œuvre tragique par sa fin, connue de tous et inéluctable. L’intrigue même est le long déroulement patient des circonstances qui conduisent nécessairement au drame final. D’une certaine manière, il était nécessaire, pour Les Lois de l’Attraction de commencer par la fin afin de lever tout suspens. Non, l’histoire ne pourra pas bien se terminer, non, aucune de ces gravures de mode ne sera épargnée par la cruauté du monde moderne, non, il n’y a aucun espoir. 

Toute l’ironie du film est que cette corruption intime des individus qui les poussent à l’autodestruction ou au vampirisme se donne le visage même de la pureté angélique sous les traits d’acteurs plus habitués aux poudres d’Hollywood et aux suréclairages du cinéma qu’à la poussière et aux planches de l’antique théâtre.


 





7 à la maison [2] pour Jessica Biel, Dawson’s Creek [3] pour James van der Beek, Young Americans [4] pour Ian Somerhalder, tout porte à croire que le réalisateur et son directeur de casting ont tout fait pour salir d’innocents jeunes acteurs comme pour cracher au visage de l’Amérique et pour montrer où les valeurs qui sont les siennes vont la conduire. C’est pourquoi il faut montrer la fin en premier.

Une clé de lecture est à trouver dans les paroles prononcés par Paul, selon lui, les individus ne sont pas libres, ils sont déterminés. Pourquoi dès lors attendre la fin pour connaitre en l’issue quand la fatalité ne laisse pas arriver autre chose que ce qui doit arriver. Tout suspens serait menteur et laisserait à penser que les individus peuvent faire quelque chose pour changer ce qui leur arrive. Puisqu’il n’en est rien, autant que le spectateur sache la fin immédiatement.

« La chance n’est pour rien dans rien, tout est réglé d’avance. Destinée manifeste. On ne peut pas plus arrêter ce qui doit arriver que l’on ne peut faire déborder les océans ou forcer la lune à quitter son orbite. »

Destinée manifeste n’est pas une simple création poétique, c’est un véritable concept politique américain professée au XIXème siècle pour soutenir le moral des colons anglais et les encourager à conquérir leur environnement : 

« C'est notre destinée manifeste de nous déployer sur le continent confié par la Providence pour le libre développement de notre grandissante multitude. »[5]




GAST J., American Progress, peinture à l’huile, 1872.


Dans son imaginaire et dans la façon dont il se comporte à l’égard du reste du monde, les Etats Unis se comportent comme un second peuple élu (étant donné qu’on ne pourra jamais remplacer le premier) dont les membres les plus jeunes sont les membres les plus actifs de la propagande et de la promotion du modèle américain. Oubliées les années 70 où la jeunesse pouvaient apparaitre comme une frange contestataire, elle est désormais le visage angélique de la corruption et de l’ignominie. À l’intérieur de la forme très classique de la tragédie antique, le réalisateur subvertit complètement le fameux kalos kagathos[6] et montre par l’absurde à quel point la beauté physique doit être détachée de l’excellence morale. Photographie, mise en scène et maquillage tous les stratagèmes sont utilisés pour sublimer les corps et nous faire oublier l’horreur morale des scènes ainsi illustrées. Difficile de ne pas relier cela aux peintures de vanités ou aux vanités littéraires dont Dorian Gray est une des illustrations paradoxales[7] les plus marquantes.


« Mais nous ne récupérerons jamais notre jeunesse. La pulsation de joie qui bat en nous quand nous avons vingt s’engourdit. Nos membres nous font défaut, nos sens se décomposent. Nous dégénérons, et nous devenons des pantins hideux, hantés par le souvenir des passions qui nous ont trop effrayés, et des tentations exquises auxquelles nous n’avons pas eu le courage de céder. Jeunesse ! jeunesse ! Il n’y a absolument rien en ce monde que la jeunesse ! »[8]



Comment croire que Les lois de l’attraction célèbrent cette jeunesse dorée quand ils en montrent le naufrage ? Sean est le frère de Pat Bateman[9], un autre « héros » de Bret Easton Ellis, homme d’affaire richissime et complètement psychopathe. 



La mère de Paul et la mère de Richard sont de vieilles bourgeoises qui tentent vainement de cacher leur alcoolisme et leur dépendance aux médicaments anxiolytiques.


Le temps n’a pas de prise sur ces sordides personnages, non pas seulement parce qu’ils restent figés dans une jeunesse illusoire, mais parce que le récit se situe dans le temps mythique, in illo tempore comme dirait Mircea Eliade. Ce que nous dit Jean Pierre Vernant est tout à fait révélateur de ce rôle particulier de critique des mœurs que pouvait avoir le théâtre grec dans l’Antiquité :

« Par cette distance qui s’est creusée au cœur de l’expérience sociale, le mythe est désormais regardé avec l’œil du citoyen. Mais ce n’est pas seulement l’univers du mythe qui, sous ce regard, devient tout entier problématique. Le monde de la cité se trouve du même coup mis en question et contesté dans certains de ses principes essentiels. »[10]

La critique met en avant les contradictions de la société, certes, mais Les lois de l’attraction ne s’y limitent pas, elles mettent également en avant les dissonances qui résident au sein de chaque protagoniste en montrant, l’individu divisé et déchiré qu’est l’homme moderne. Si la psychanalyse a un intérêt, c’est bien celui de montrer la multiplicité et la duplicité du sujet :

« La division du psychique en un psychique conscient et un psychique inconscient constitue la prémisse fondamentale de la psychanalyse »[11]

« La perception est au Moi ce que l’instinct ou l’impulsion instinctive sont au Ça. Le Moi représente ce qu’on appelle la raison et la sagesse, le Ça, au contraire, est dominé par les passions. »[12]

« Nous avons exposé ailleurs les raisons qui nous avaient décidé à admettre une certaine phase du Moi. produit d’une différenciation s’étant accomplie au sein de celui-ci, phase à laquelle nous avons donné le nom d’Idéal du Moi ou de Sur- Moi. »[13]

Toute tentative de réunification de l’individu, toute exigence de cohérence est impossible à satisfaire tant la division est ancrée en lui. C’est pourquoi le film joue beaucoup sur les contrastes, les paradoxes qui rendent certaines situations absurdes jusqu’à l’humour. C’est le cas en tout cas lorsque le langage le souligne pour faire apparaître toutes les contradictions du discours :

« Depuis quand coucher avec une autre veut dire qu’on est pas fidèle ? »[14]

Ce qui une fois de plus, dans un paradoxe qui éclate au grand jour, rejoint ce que Vernant nous dit du théâtre antique :



« La tragédie est le premier genre littéraire qui présente l’homme en situation d’agir, qui le place au carrefour d’une décision engageant son destin. Mais ce n’est pas pour souligner dans la personne du héros les aspects d’agent, autonome et responsable. C’est pour le peindre comme un être déroutant contradictoire et incompréhensible : agent mais aussi bien agi, coupable et pourtant innocent, lucide en même temps qu’aveugle. » [15]

Ces contradictions internes aux personnages peuvent les pousser jusqu’au mensonge et au cynisme le plus total. Alors que le personnage de Rupert le dealer est tout à fait détestable, on ne peut s’empêcher de lui donner raison lorsqu’il évoque la détermination sociale (qui elle aussi peut être illustrée sous la forme de lois) qui fera réussir ces riches étudiants indépendamment de leur talent et même du travail qu’ils fourniront. Sean s’en sort alors par un mensonge de plus par lequel il s’achète la sympathie de Rupert.

Si les personnages ne cessent de se contredirent, de tenir des discours incohérents et si leurs pratiques sont en dissonance complète avec leur conception théorique de l’existence, ce n’est pas tant parce que ce sont de jeunes adolescents décérébrés mais bien parce qu’ils sont humains, trop humains sans doute.

La critique de l’Amérique est donc aussi subversive que discrète. Les américains courent au pire et voient dans le désastre des signes de leur réussite et de leur élection. Pire encore, les américains semblent réussir à travestir leurs plus cuisants échecs en réussite en y sacrifiant, semble-t-il, la vérité.

Si le film commence par la fin pour ensuite remonter dans le temps, ce n’est pas un caprice artificieux ou une vaine exigence esthétique, c’est le meilleur moyen scénique de montrer les chaines causales qui déterminent fondamentalement les personnages du film. En un sens, cette tragédie moderne est bien un enfer puisqu’il faut pour y entrer abandonner tout espoir. 

« Toi qui entre ici abandonne toute espérance. » [16]

Le film se clôt assez naturellement sur le générique ? Comment faire autrement ? Le réalisateur a l’intelligence de le faire défiler en sens inverse pour faire concorder cette obligation légale avec les exigences formelles du film, remonter des conséquences aux causes originelles, ce que nous verrons après notre analyse du mensonge.

La reconnaissance du visage est donc le premier pas de la rencontre, la condition de possibilité de toute rencontre. La soirée « prêt-à-baiser » contraint les participants à porter des masques comme pour leur interdire toute rencontre, comme si l’acte sexuel, réduit à sa stricte dimension mécanique était possible sans rencontre.

Le mensonge :

Les Lois de l’attraction ne cessent de rappeler l’importance du mensonge allant même jusqu’à faire de lui la condition de possibilité de toute société :
« C'est seulement grâce à sa capacité d'oubli que l'homme peut parvenir à croire qu'il possède une « vérité » au degré que nous venons d'indiquer. S'il ne peut pas se contenter de la vérité dans la forme de la tautologie, c'est-à-dire se contenter de cosses vides, il échangera éternellement des illusions contre des vérités. »[16]


« On m’a raconté une fois que j’étais plus à Camden qu’un jour elle était tellement bourré qu’elle était allée au dortoir des mecs et s’étaient envoyé toute l’équipe de foot. Aujourd’hui elle est mariée à un sénateur et elle a quatre enfants. Le temps déforme les choses. »[17]


Il est inutile de faire l’inventaire de tous les mensonges du film et nous irions plus vite en affirmant que tout est faux[18], sauf peut-être le contenu des lettres d’amour dont l’auteur finit par se suicider et ce que se disent les protagonistes à la fin du film. En ce qu’il montre délibérément le mensonge, le film montre la nature humaine la plus profonde nous interdisant d’une certaine manière de nous attacher aux personnages.

« Le menteur utilise les désignations valables, les mots, pour faire apparaître l'irréel comme réel ; il dit par exemple : "je suis riche" alors que "pauvre" serait pour son état la désignation correcte. Il maltraite les conventions établies par des substitutions arbitraires et même des inversions de noms. S'il fait cela par intérêt et en plus d'une façon nuisible, la société lui retirera sa confiance et du même coup l'exclura. »[19]

Alors que nous prenions en pitié, dans l’introduction finale, les pauvres protagonistes aussi ridicules que misérables, le cours du film nous montre les mensonges constants dont ils sont les relais et nous montre à quel point ils sont responsables de la situation finale.

Il faut se mentir ou oublier les actions des individus pour réussir à les supporter, la vie bonne et vertueuse est impossible, il faut s’efforcer d’ignorer nos péchés.

En ce sens, Avary souscrit tout à fait à la thèse nietzschéenne, sans le mensonge, les hommes ne pourraient se supporter, ne pourraient même pas poursuivre un quelconque but que ce soit. La vanité de la relation amoureuse, dénuée de l’illusion qui l’entoure rendrait cette dernière aussi exécrable que vile :

« La désillusion totale. Alors que je me languis de Lauren, je saute sa copine de chambre. C’est l’inévitable aboutissement. On dirait de la mauvaise poésie. Et quoi après ? Je bande, il faut que j’aille au bout. Et voilà qu’elle gémit. Je la lime et que je la relime. Ca ne finira jamais. J’aurais pas dû faire ça. J’aurais dû laissé un peu d’innocence dans tout ça. »[20]

Si les hommes ne peuvent saisir à quel point « on » leur ment à propos de l’amour, c’est que la nature elle-même s’en mêle, et si l’on ose la personnification, on peut dire que la nature elle-même ment à l’homme. Dès lors que l’homme comprend que la réalité sexuelle n’est en rien le fantasme amoureux, il se déchire d’avoir été trompé à ce point. La thèse schopenhauerienne apparait ici de façon tout à fait évidente :

« Aux plus hauts degrés de la passion, cette chimère brille d’un tel éclat que, si la réalité n’y peut être conforme, la vie même perd tout son charme et parait dès lors si vide de joie, si fade, si fastidieuse, que le dégout triomphe des craintes provoquées par la mort. »[21]

Le sexe semble donc être la destination universelle de tous les désirs humains, le désir fondamental, celui auquel tous les autres ne pourraient être rapportés que dans un rapport de dépendance subalterne. Puisque l’attraction sexuelle vers les autres individus est le premier moteur, pour le dire en des termes aristotéliciens, tous les autres désirs doivent être rapportés à celui-ci. Si le sexe semble être la préoccupation principale du roman comme du film, ce n’est pas tant parce que Ellis ou Avary sont des obsédés quoi qu’ils le soient sans doute par ailleurs, mais bien parce que le désir de tous les désirs, l’Eros, est d’ordre sexuel, c’est celui-ci dont il faut rendre compte pour expliquer les comportements humains.

De l’amour comme première cause découlent toutes les causes secondaires de nos actions. Dans Les Lois de l’attraction que l’objectif poursuivi soit la drogue, la richesse ou l’alcool, tous se rapportent au but final qu’est la relation sexuelle. L’ironie c’est précisément que le but le plus ultime est également le plus vain de tous, celui qui peut être satisfait sans jamais être assouvi. Les individus sont donc prisonniers d’un réseau de désirs dont ils sont prisonniers, tenus par l’illusion suprême qu’est l’amour.

« XXVI. En reconnaissant que tout être fini s’appuie nécessairement sur d’autres êtres finis, dans son existence et donc aussi dans son agir et pâtir, et nécessairement se rapporte à eux, nous reconnaissons en même temps l’assujettissement de tous les êtres, et de chaque être particulier, à des lois mécaniques. Dans la mesure en effet où leur être et agir son médiats, ils doivent strictement reposer sur les lois du mécanisme : l’action de chacun est en partie l’action d’un autre. »[22]

Auparavant nous aurions pu compter sur la grâce divine pour nous libérer de la tentation, mais après la mort, voir le meurtre de Dieu, quel espoir avons-nous d’être sauvés ?

L’agôn tragique n’aboutit pas sur le conflit attendu, mais sur l’impossibilité même des personnages à se rencontrer :

« La vocation spirituelle de l'homme se manifeste déjà dans cette lutte de tous contre tous, car cette lutte n'est pas seulement une lutte pour la vie, elle est une lutte pour être reconnu, une lutte pour prouver aux autres et se prouver à soi-même qu'on est une conscience de soi autonome, et l'on peut se le prouver à soi-même qu'en le prouvant aux autres et en obtenant cette preuve d'eux. »[23]

Le cinéma permet de mettre en scène ce mensonge pour laisser les hommes de poursuivre cette Destinée manifeste dont la conclusion sordide est cette espèce de peinture des derniers hommes et de la gloire américaine avant son déclin.

« Hélas ! ce qui vient, c’est l’époque de l’homme méprisable entre tous, qui ne saura même plus se mépriser lui-même. […] La terre alors sera devenue exigüe, on y verra sautiller le Dernier Homme, en clignant de l’œil. »[24]

L’incapacité des personnages à se rencontrer :

Le mensonge comme volonté affirmée de tuer la vérité ou de la ravir aux yeux de tous finit par avoir de funestes conséquence ou en tout cas celle que le langage cinématographique s’efforce le plus de rendre compte est l’impossibilité pour les protagonistes de se rencontrer.


Comment qualifier philosophiquement la rencontre ? La rencontre n’est pas seulement proximité temporelle que peuvent partager deux objets, elle n’est même pas la coexistence de deux sujets dans un même espace, elle est l’instant où deux sujets, se reconnaissant comme tels font de l’autre l’unique objet visé par leur conscience. Si c’est bien cela une rencontre, alors Les Lois de l’attraction est un film dont l’histoire n’est rien d’autre qu’une somme de rencontres ratées.

Que suppose la rencontre ? Deux agents, certes, mais également la volonté délibérée d’aller l’un vers l’autre. L’attraction nous soumet à ses lois, semblables aux lois physiques nous réduisant à l’état d’objet. Je crois qu’il faut comprendre cela pour comprendre que le pessimisme du film n’est pas l’ironie cynique et détachée du contempteur du corps, mais bien le dégout à l’égard de cette attraction qui fait de nous des bêtes alors que nous aurions voulu être des anges :

« L’homme n’est ni ange ni bête et le malheur veut que qui veut faire l’ange fait la bête » [25]

Dès le début du film, Sean rate sa première rencontre avec Lauren qui monte alors avec un prétendu étudiant en cinéma dans ce qui est sa prétendue chambre pour fumer de l’herbe. Le mensonge est peut-être le symptôme le plus évident de cette facticité des relations humaines réductibles à des lois physiques régissant le mouvement des corps c’est pourquoi aucun personnage du film ne peut porter la parole authentique et tous sont des mises en scènes d’eux-mêmes dans une pièce qu’ils ignorent.



Ce parallèle dressé entre le théâtre et l’amour n’est pas nouveau mais en soulignant l’importance de l’amour et les pantins aliénés en lesquels il est capable de transformer l’homme place très clairement l’œuvre dans la lignée philosophique de Schopenhauer[26] :

« Considérons maintenant, sans perdre de vue ce principe, le rôle important que joue l’amour, à tous ses degrés et à toutes ses nuances, non seulement au théâtre et dans les romans, mais aussi dans le monde réel. Avec l’amour de la vie il nous apparait comme le plus puissant et le plus énergique de tous les ressorts ; il accapare sans cesse la moitié des forces et des pensées de la partie la plus jeune de l’humanité »[27]

La première soirée à laquelle va Sean croise un certain nombre d’individus sans leur accorder la moindre attention et où il rencontre Paul et se donnent rendez vous pour un malentendu illustre une dissonance oxymorique entre la chanson retenue[28] et les images illustrées.



En réalité, toutes les rencontres ne sont pas des échecs, en vérité, il y a bien une rencontre réussie dans Les Lois de l’attraction mais l’espoir frustré qu’il réveille est sans doute encore pire que la tiède apathie qui règne dans cet univers. Si la mise en scène insiste une fois de plus sur la séparation des deux personnages par l’adoption d’un split screen qui va filmer Sean et Lauren jusqu’à leur entrevue impromptue à l’entrée d’un cours annulé, c’est pour mieux se fondre en un seul écran qui va symboliser leur rencontre, la seule véritable du film qui va ouvrir le sombre horizon par l’espoir amoureux.

Sean enlève ses lunettes et se montre, d’une certaine manière à découvert, comme si l’imprévisibilité de la situation et le hasard étaient les seuls moyens d’échapper aux calculs carnassiers et prédateurs.


« Et dans l’épreuve du regard, en m’éprouvant comme objectivité non révélée, j’éprouve directement et avec mon être l’insaisissable subjectivité d’autrui. »[29]

« J’appelle l’attention sur la façon dont l’œil lui-même et en soi n’est pas pour l’homme simplement un miroir mort, passif, comme la surface de l’eau qui dort, le miroir fabriqué par l’art, ou l’œil de l’animal. »[30]


Comme la chanson optimiste et joyeuse que l’on peut entendre dans le film à ce moment[31], le personnage croit possible une véritable relation avec Lauren, il s’imagine ainsi pouvoir échapper à la solitude métaphysique qui semble être notre lot à tous.


L’échec de toutes ces relations renvoie l’individu, en l’occurrence le personnage principal, celui qui, à partir de sa psyché délirante imaginait des fins tout à fait ubuesques aux différents personnages, à sa propre solitude. Il termine le film au guidon de sa moto, laissant tout derrière lui, s’évanouissant en lui l’illusion de ne jamais oublier celle dont il était tombé amoureux.

« En quoi consiste l'acuité de la solitude? Il est banal de dire que nous n'existons jamais au singulier. Nous sommes entourés d'êtres et de choses avec lesquels nous entretenons des relations. Par la vue, par le toucher, par la sympathie, par le travail en commun, nous sommes avec les autres. Toutes ces relations sont transitives : je touche un objet, je vois l'Autre, mais je ne suis pas l'Autre. Je suis tout seul. » [32]

Auparavant nous aurions pu compter sur la grâce divine pour nous libérer de la tentation, mais après la mort, voir le meurtre de Dieu, quel espoir avons-nous d’être sauvés ? Pouvons-nous espérer au moins échapper à l’oubli qui suivra notre mort ? Il faudrait pour cela que quelqu’un se souvienne de nous.  Si la rencontre est impossible, alors comment croire qu’autrui m’accorde la moindre importance ? Faute d’engager la moindre relation gratuite et authentique, les personnages du film forcent sans cesse le contact jusque dans l’interaction violente. L’agôn tragique n’aboutit pas sur le conflit attendu, mais sur l’impossibilité des personnages à se rencontrer, alors même que cette reconnaissance par autrui est pourtant ce qu’ils poursuivaient :
           
« La vocation spirituelle de l'homme se manifeste déjà dans cette lutte de tous contre tous, car cette lutte n'est pas seulement une lutte pour la vie, elle est une lutte pour être reconnu, une lutte pour prouver aux autres et se prouver à soi-même qu'on est une conscience de soi autonome, et l'on peut se le prouver à soi-même qu'en le prouvant aux autres et en obtenant cette preuve d'eux. »[33]

Quelle que soit la force (physique ou symbolique) avec laquelle les personnages s’opposent, à aucun moment elle ne permet ce qu’elle promettait et n’est réduite qu’à sa stricte réalité, une violence sans morale et sans fondement dont le seul espoir était de conquérir la rencontre qu’elle a rendu impossible.

Au fond, la tragédie n’est pas tant le contenu du film, acerbe et tout à la fois naïve caricature du rêve américain que cette solitude qui nous saisit aux tripes comme elle saisit Sean lorsque s’éteint pour nous le petit théâtre de marionnettes qu’est notre vie sociale.

« Au lieu de s'oublier dans la légèreté essentielle du sourire, où l'existence se fait innocemment, où dans sa plénitude même elle flotte comme privée de poids et où, gratuit et gracieux, son épanouissement est comme un évanouissement, l'existence dans la lassitude est comme un rappel d'un engagement à exister, de tout le sérieux, de toute la dureté d'un contrat irrésiliable. »[34]

La reconnaissance du visage est donc le premier pas de la rencontre, la condition de possibilité de toute rencontre. La soirée « prêt-à-baiser » contraint les participants à porter des masques comme pour leur interdire toute rencontre, comme si l’acte sexuel, réduit à sa stricte dimension mécanique était possible sans rencontre.


Le désir qui anime les hommes ne les rassemble pas, comme pourrait le laisser penser Platon dans Le Banquet. Au contraire, le désir serait bien plutôt un affect vampirique qui vise à capter ce qu’il nous manque pour nous en repaitre sans le désirer à nouveau. C’est en ce sens que Sean, le personnage principal parle de lui comme d’un vampire émotionnel.

« Aussi l’homme qui est dans ce cas, et quiconque éprouve le désir de quelque chose, désire ce dont il ne dispose pas et ce qui n’est pas présent ; et ce qu’il n’a pas, ce qu’il n’est pas lui-même, ce dont il manque, tel est le genre des choses vers quoi vont son désir et son amour. »[35]

Sean privé d’humanité, d’innocence et d’espoir va donc chercher à capter cela chez ses conquêtes en les souillant irrémédiablement par une appropriation si violente qu’elle arrache les jeunes personnes à elle-même. Un mouvement qui n’est pas sans rappeler la dialectique hégélienne de la reconnaissance de la conscience et qui, dans la formulation qu’en donne Kojève décrit précisément les rapports de Sean aux autres personnages :

« Etant née du Désir, l’action tend à le satisfaire, et elle ne peut le faire que par la « négation », la destruction ou tout au moins la transformation de l’objet désiré : pour satisfaire la faim, par exemple, il faut détruire ou, en tout cas, transformer la nourriture. Ainsi, toute action est « négatrice ». Loin de laisser le donné tel qu’il est, l’action le détruit ; sinon dans son être, du moins dans sa forme donnée. »[36]


La consommation détruit et consume l’objet désiré, en le faisant disparaitre, il révèle par là même l’absence dont nous sommes responsables et nous nous montrons à nous même comme de véritables destructeurs. Ce qu’il y a de tragique, c’est ce que cette violence ne saurait être assumée puisqu’elle ne peut être reconnue. Elle se fait à l’insu du personnage qui est cruel, sans même le savoir.

                        « L’homme est un jouet inconscient de ce qui l’anime. »[37]



« D’une manière générale, le Moi du Désir est un vide qui ne reçoit un contenu positif réel que par l’action négatrice qui satisfait le Désir en détruisant, transformant et « assimilant » le non-Moi désiré. »[38]
Si le désir semble avoir été loué et célébré pour en souligner la toute-puissance, l’issue sordide de cette fête décadente (le suicide de la seule femme capable d’amour véritable) illustre la vanité du monde dans lequel vivent tous les personnages. Comment y voir une célébration, alors même que le réalisateur, en choisissant de montrer toutes les apparitions de la jeune fille qui va commettre l’irréparable souligne que le spectateur, loin de l’avoir remarqué alors qu’elle était pourtant à l’image, est complice de ce culte de l’apparence. Il n’a pas prêté attention à la jeune fille qui apparaît pourtant à quatre reprises dans le film.

« Visage et discours sont liés. Le visage parle. Il parle, en ceci que c'est lui qui rend possible et commence tout discours. J'ai refusé tout à l'heure la notion de vision pour décrire la relation authentique avec autrui ; c'est le discours, et, plus exactement, la réponse ou la responsabilité, qui est cette relation authentique. […] Il faut parler de quelque chose, de la pluie et du beau temps, peu importe, mais parler, répondre à lui et déjà répondre de lui. »[39] 

Les acteurs dans cette scène paroxystique sont doublement masqués, parce qu’ils portent des masques pour cacher leur identité (que l’on devine pourtant aisément) mais également en tant que personnages si l’on en croit l’étymologie du mot. Persona en latin renvoie au théâtre et au masque porté par les acteurs pour spécifier leurs rôles. La rencontre est donc doublement impossible et il serait même stupide d’attendre quelque rencontre que ce soit dans ces conditions. Pourquoi encore alors parler d’acteurs puisque nous sommes, en tant que projections sociales tous des acteurs ? En tant qu’acteurs, précisément nous construisons le champ politique non pas parce que nous mentons sur notre propre identité, mais parce que nous agissons :

« L’action, la seule activité qui mette directement en rapport les hommes, sans l’intermédiaire des objets ni de la matière, correspond à la condition humaine de la pluralité au fait que ce sont des hommes et non pas l’homme, qui vivent sur terre et habitent le monde. »[40]

Si le mot acteur a deux sens, l’homme moderne oublie le sens premier de l’agent pour ne retenir que le synonyme affadi du comédien qui se ment à lui-même et qui ment aux autres sur sa propre identité, universalisant ainsi le mensonge et l’élevant au rang de rapport premier au monde. Il devient plus que nécessaire d’inventer une métaphysique de combat pour résister à la dégénérescence ontologique dans laquelle nous précipite ce mensonge devenu fondement.

Les définitions sociales usuelles nous interdisent une rencontre authentique tant nous sommes pris au sein de multiples réseaux d’influences, hiérarchies d’autorité, autant de toiles dont nous sommes les malheureux prisonniers.

La réflexion morale au cœur de l’œuvre Les Lois de l’attraction me semble indubitable. Même si le cynisme incarné par un des personnages en particulier nous interroge, il ne faut pas douter de la portée édifiante du propos. Au contraire, si nous sommes interrogés en tant que spectateur, c’est pour ne pas nous lover dans la position béate de l’admiration esthétique face aux jolies formes dessinées, mais pour s’indigner de la déchéance dans laquelle s’abime les hommes qui se soumettent aux lois de l’attraction.

Si le désir apparaît comme le moteur de l’action des hommes, il ne s’agit pas d’en louer la beauté, mais de montrer, précisément, comment réduisant autrui à l’objet, j’en viens à nier son humanité. En privant l’individu de son intériorité en le réduisant à sa dimension physique, en ne lui reconnaissant pas la capacité de se déterminer autrement que par réaction aux circonstances données, en niant jusqu’à sa liberté, nous nous donnons les moyens concrets de faire advenir une société sans hommes. 


« Car le Désir en tant que Désir, c’est-à-dire avant sa satisfaction, n’est en effet qu’un néant révélé, qu’un vide irréel. Le Désir étant la révélation d’un vide, étant la présence de l’absence d’une réalité[…] »[37]
En niant la réalité psychologique des hommes et en niant l’être même par la poursuite effrénée du désir, la modernité dépeinte par Les Lois de l’attraction nous précipite dans un nihilisme radical et dévorant. Espérons que cette œuvre de fiction se soit trompée dans le diagnostic de notre époque.

[1] EASTON ELLIS B., American Psycho, traduction Defossé, 10/18, Paris, 2005.

[2] HAMPTON B., 7th Heaven, WB, 1996.
[3] WILLIAMSON K., Dawson’s Creek, AB1, 1998.
[4] ANTON S., Young Americans, WB, 2000.
[5] O’SULLIVAN J., United States Magazine and Democratic Review, 1844.
[6] καλὸς κἀγαθός, l'association du Beau et du Bon en grec.
[7] Si l’œuvre d’Oscar Wilde en est la monstration paradoxale, c’est parce que les atouts de Dorian Gray ne fanent pas comme ils le devraient.
[8] WILDE O., Le portrait de Dorian Gray, traduction Gattégno, Gallimard, Folio Classique, p. 83.
[9] BRET EASTON ELLIS, American Psycho, traduction Defossé, 10/18, 1991.
[10] VERNANT J. P., article Tragédie in Le dictionnaire du théâtre
[11] FREUD S., Le Moi et le Ça, La conscience et l’inconscient, traduction Jankélévitch, Wikisource.
[12] FREUD S., Le Moi et le Ça, Le Moi et le Ça, traduction Jankélévitch, Wikisource.
[13] FREUD S., Le Moi et le Ça, Le moi, le sur-moi et l’idéal du moi, traduction Jankélévitch, Wikisource.
[14] AVARY R., Les Lois de l’attraction, Metropolitain, 2002.
[15] VERNANT J. P., article Tragédie in Le dictionnaire du théâtre
[16] DANTE A., La Divine Comédie, L’Enfer, traduction , GF Flammarion.
[16] NIETZSCHE F., Vérité et mensonge au sens extra moral, traduction Haar et de Launey, Aubier-Flammarion, 1969.
[17] AVARY R., Les lois de l’attraction, Metropolitain, 2002.
[18] Par essence, le cinéma est déjà l’illusion du mouvement.
[19] NIETZSCHE F., Vérité et mensonge au sens extra moral, traduction Haar et de Launey, Aubier-Flammarion, 1969.
[20] AVARY R., Les Lois de l’attraction, 1h06, Metropolitain, 2002.
[21] SCHOPENHAUER A., Le monde comme volonté et comme représentation, traduction Burdeau, PUF,
[22] JACOBI, Lettre sur le nihilisme, traduction Radrizzani, GF Flammarion, 2009.
[23] HYPPOLITE J., Génèse et structure de la Phénoménologie de l'esprit de Hegel (1946), I, Aubier, p. 163, Paris, 1946.
[24] NIETZSCHE F., Ainsi parlait Zarathoustra, (1883), traduction Bianquis, GF Flammarion, 2006.
[25] PASCAL, Pensées, GF Flammarion,
[26] Alors que c’est plutôt de Nietzsche dont il tendrait à se réclamer, si l’on en croit la citation inscrite au tableau de l’universitaire.
[27] SCHOPENHAUER A., Le monde comme volonté et comme représentation, Métaphysique de l’amour, traduction Burdeau, PUF, Quadrige, 2006.
[28] THE RAPTURE, Out Of The Races and Onto The Tracks, DFA Records, 2002.
SHAKE SHAKE SHAKE SHAKE SHAKE                   Remuez Remuez Remuez Remuez Remuez
Get yourself together                                      Regroupez-vous
[29] SARTRE J.P., L’être et le néant (1943), p 309 – 310, éd. Gallimard, coll. « Tel », 1976.[30] FICHTE G.J.Fondement du droit naturel selon les principes de la doctrine de la science (1796), traduction Renault, PUF, « Epiméthée », Paris, 1984.
[31] HYPPOLITE J.Génèse et structure de la Phénoménologie de l'esprit de Hegel (1946), I, Aubier, p. 163, Paris, 1946.
[32] DONOVAN, Colours, Pye, 1965.
Yellow is the colour of my true love's hair,   Le jaune est la couleur des cheveux de mon véritable amour
In the morning, when we rise,                         Le matin, lorsque nous nous levons,
In the morning, when we rise.                         Le matin, lorsque nous nous levons.
That's the time, that's the time,                       C’est le moment, c’est le moment,
I love the best.                                                    Que je préfère.
[33] LEVINAS E., Le temps et l’autre, Paris, PUF, Quadrige, 1983, p. 21.
[34] LEVINAS E., Ethique et infini, Dialogues avec Philippe Nemo, Paris, Fayard, 1982, p. 105.
[35] PLATON, Le Banquet, traduction Brisson, GF Flammarion, Paris, 2005.
[36] KOJEVE A., Introduction à la lecture de Hegel, En guise d’introduction, propos réunis et publiés par Queneau, Gallimard, Tel, Paris, 1947.
[37] SCHOPENHAUER A.Le monde comme volonté et comme représentation, traduction Burdeau, PUF, Paris, 
[38] KOJEVE A., Introduction à la lecture de Hegel, En guise d’introduction, propos réunis et publiés par Queneau, Gallimard, Tel, Paris, 1947.
[39] LEVINAS E., Éthique et infini, édition le Livre de Poche, Biblio Essais, p. 92, Paris, 1984.
[40] ARENDT H., La condition de l’homme moderne, chapitre premier, La condition humaine, traduction Fradier, édition Pocket, Paris, 1983.
[41] KOJEVE A., Introduction à la lecture de Hegel, En guise d’introduction, propos réunis et publiés par Queneau, Gallimard, Tel, Paris, 1947.