Quoi de plus absurde que de répondre à l’injonction de la nouveauté quand elle se formule au travers d’une langue morte ? C’est peut être pour conjurer la fin du langage philosophique que je tente de manifester sa pertinence au travers de thèmes et d’objets issus du quotidien.

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jeudi 1 décembre 2011

Si tu me paies un verre



Si tu me payes un verre, je ne te demanderai pas
Où tu vas, d'où tu viens, si tu sors de cabane,
Si ta femme est jolie, ou si tu n'en as pas,
Si tu traînes tout seul, avec un coeur en panne...
Je ne te dirai rien, je te contemplerai;
Nous dirons quelques mots, en prenant nos distances,
Nous viderons nos verres et je repartirai
Avec un peu de toi, pour meubler mon silence...

Si tu me payes un verre, tu pourras, si tu veux,
Me raconter ta vie, en faire une épopée,
En faire un opéra... J'entrerai dans ton jeu,
Je saurai sans effort me mettre à ta portée,
Je réinventerai des sourire de gamin,
J'en ferai des bouquets, j'en ferai des guirlandes,
Je te les offrirai, en te serrant la main,
Il ne te reste plus qu'à passer la commande...

Si tu me payes un verre, que j'aie très soif ou pas,
Je te regarderai comme on regarde un frère,
Un peu comme le Christ, à son dernier repas,
Comme lui, je dirai deux vérités premières:
Il faut savoir s'aimer, malgré la gueule qu'on a,
Et ne jamais juger le bon, ni la canaille,
Si tu me payes un verre, je ne t'en voudrai pas
De n'être rien du tout... Je ne suis rien qui vaille...

Si tu me payes un verre, on ira jusqu'au bout,
Tu seras mon ami, au moins quelques secondes,
Nous referons le monde, oscillants, mais debout,
Heureux de découvrir que, si la terre est ronde,
On est aussi ronds qu'elle, et qu'on s'en porte bien,
Tu cherchais dans la foule une voix qui réponde,
Alors, paye ton verre, et je t'aimerai bien,
Nous serons les cocus les plus heureux du monde...

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